AD PERPETUAM REI MEMORIAM

Nicolas Diot
1744-1803

Lettre aux curés et vicaires

 

À Messieurs les Curés ou Vicaires du District de REIMS.

 

NOUS avons appris, MESSIEURS, qu'il se répandait dans le District de Reims un Mandement signé † ALEX. ANG. Archevêque de Reims, donné à Paris le 14 Novembre 1790, portant adoption de l‘Instruction Pastorale de M.  l’Évêque de Boulogne, sur l'autorité spirituelle de l’Église.

Le but de cette publication semble devoir être de former une coalition contre les Décrets de l’Assemblée Nationale, qui concernent la Constitution civile du Clergé ; on se flatte sans doute qu'en détournant les Pasteurs de la soumission aux Lois, on parviendra, par leur moyen, à répandre parmi les peuples l’esprit d’insubordination. On se plaint que la liberté dans plusieurs localités a dégénéré en licence ; quel, reproche n'ont pas à se faire ceux qui, de dessein prémédité et sous le voile Sacré de la Religion, deviennent la cause d’un si grand mal !

Il n’est point question de dogme ni d'article de foi, tous en conviennent ; il ne s'agit que du droit de fixer les limites des Évêchés et des Cures ; on se propose de rappeler, sur la discipline extérieure de l’Église, ces antiques maximes qui faisaient sa gloire, en associant le concours des peuples au choix des Pasteurs ; enfin, l'objet que la Nation se propose, est de rendre aux Souverains ce pouvoir que l'ambition et le fanatisme avaient usurpé dans des siècles d'ignorance. L’histoire nous atteste qu’avant ces jours d’obscurité, que les passions s’efforçaient d’épaissir pour étendre plus durement leur empire, les Ecclésiastiques n’étaient réellement considérés que comme des fonctionnaires publics, soumis, dans tout l'extérieur, aux Lois des Gouvernements où ils étaient établis. Les Lois de Théodose et de Justinien nous prouvent que les Empereurs réglaient eux-mêmes une grande partie de cette discipline , qu'on s’efforce aujourd'hui de confondre avec ces fonctions purement spirituelles, qui forment, sans contradiction, le caractère qui les distingue.

Ces grandes questions, discutées, éclaircies dans le sein de l’Assemblée Nationale, ne laissent plus aux Citoyens que l’obéissance et la soumission aux lois qu'elle a décrétées et que le Roi a sanctionnées. Résister à ces lois, se refuser à ce qu’elles ordonnent, c’est semer le trouble, et exciter une fermentation dont les suites ne peuvent être que funestes à la tranquillité publique. D’après ces principes non équivoques, et dont l'évidence frappe même ceux qui les contrarient, nous disons qu’on ne peut publier le Mandement ci-dessus cité, sans avoir le projet de former une coalition dangereuse, et contraire au respect et à la soumission dus à des Décrets revêtus des formes légales ; et que ceux qui, de quelque manière que ce soit, favoriseront une pareille entreprise, ne peuvent être regardés que comme des perturbateurs. du. repos public.

En conséquence, défendons à toutes personnes auxquelles ledit Mandement aurait pu avoir été adressé pour le lire publiquement, de procéder à cette publication, sous les peines de droit, et même leur enjoignons de rapporter à notre Secrétariat les exemplaires qui auraient pu leur être adressés à cette.

Délibéré au Directoire de Reims, le 11 Janvier 1791. MOPINOT, Président ; PONSARDIN, CLÉMENT, SAGUET, BARON le jeune, SCRIBOT l’aîné, JOUVANT, Procureur-Syndic.

Délivré par nous Secrétaire-Greffier,

PETIZON.

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