AD PERPETUAM REI MEMORIAM

 

Charles de Lorraine

Archevêque de Reims
1538-1574

 Extraits de
« Histoire de Reims »
Georges Boussinesq – Gustave Laurent

Matot-Braine
Reims – 1933

        Même si nous ne partageons pas toutes les idées de Messieurs Georges Boussinesq et Gustave Laurent, nous devons reconnaître que leur travail sur le grand Cardinal archevêque de Reims est fort intéressant et mérite de figurer ici, parmi les extraits biographiques des grands évêques et archevêques de l'Église de Reims. C'est un peu notre manière de rendre hommage à ces deux hommes qui, malgré leur esprit partisan, ont su écrire une œuvre considérée par beaucoup comme la "Bible de l'Histoire de Reims", sentiment que nous partageons également.

Installation à Reims

      Lorsqu'en vertu du Concordat, nouvellement signé, entre la royauté française et le pape, en 1516, celui-ci eut remis au monarque le pouvoir de nommer aux archevêchés, le roi François Ier eut tout de suite l'idée de placer un des fils du gouverneur de la Champagne sur le siège de Reims, laissé vacant par la mort de Robert de Lenoncourt. Mais, comme ils étaient encore en bas âge, leur oncle, Jean de Lorraine, accepta pour quelque temps l'archevêché, en l'année 1532.

      Ce Jean de Lorraine était un puissant personnage. Tout en acceptant le siège de Reims, il restait évêque de Toul, de Narbonne et d'Albi, abbé de Fécamp, de Cluny et de Marmoutiers. A tous ces titres, s’ajoutait le chapeau de cardinal. Mais ce prélat fut toujours trop occupé des affaires du royaume et de la Lorraine et des difficultés de la guerre entre François Ier et Charles-Quint pour pouvoir administrer lui-même son nouveau diocèse. Des vicaires agissaient en son nom. D'ailleurs, dès que son neveu, Charles, eut atteint l'âge de 14 ans, en 1538, il lui remit l'archevêché de Reims qu'il n'avait jamais possédé qu'à titre transitoire. Le jeune Charles de Lorraine passait déjà pour un enfant prodige. Élève au collège Navarre, à Paris, il avait surmonté avec une telle aisance les obscurités de la scholastique, il avait fait preuve d'une telle intelligence, qu'il s'annonçait déjà comme destiné à devenir un des plus fermes défenseurs de la foi. Il était cependant encore bien jeune pour recevoir la consécration définitive. Aussi, de 1538 à 1545, resta-t-il chargé d'une partie de l'administration temporelle et spirituelle de son diocèse, sans avoir encore bénéficié de l'investiture définitive. Cette cérémonie ne fut célébrée qu'en février 1545. L'entrée solennelle eut lieu, en grande pompe, le 6 décembre 1546.

      La vieille cité rémoise avait donc à sa tête un jeune prélat de 22 ans, issu d'une des plus nobles familles du royaume, apparenté aux rois de l'Europe, l'un des théologiens les plus réputés. Un tel personnage devait fatalement occuper, dans l'histoire, une place de premier plan. En plein XVIe  siècle, l'archevêque Charles de Lorraine devait d'autant plus absorber toute l'activité de la cité rémoise, que la question religieuse se posait depuis quelques années avec une difficulté incontestable et devait avoir, dans notre ville, une acuité toute particulière.

La Réforme protestante

      On sait comment le mouvement de la Réforme se développa en France. Le luxe, l'avarice, la légèreté de mœurs du clergé avaient atteint au scandale. Le fait s'était déjà produit plusieurs fois depuis les temps apostoliques, et toujours du sein même de l'Église, était sorti le prélat ou le moine réformateur qui, par la seule autorité de sa parole et de son exemple, était parvenu à réprimer les abus de ses collègues et à les faire rentrer dans le droit chemin pour une nouvelle période. Mais, au commencement du XVIe siècle, l'instruction était déjà trop répandue, le besoin de connaître et de critiquer par soi-même trop développé, pour que la réforme pût s'accomplir comme par le passé, en silence, sans que la masse anonyme du bas clergé et même des fidèles s'en émût. En Allemagne, la révolte contre les doctrines de l'Église fut violemment déclenchée par le moine Luther qui commença sa campagne de propagande en 1517. En France, les nouveautés religieuses furent tout d'abord étudiées avec plus de calme, par quelques savants théologiens qui ne songeaient point, pour le moment, à sortir de l'Église romaine. Ce petit groupe de penseurs libres, pénétrés d'ailleurs du sentiment religieux, tel Le Fèvre d'Etaples qui, en 1512, publia un commentaire latin sur les Épîtres de Saint Paul, tel Guillaume Farel, de Gap, d'autres encore, se trouvait réunis à Paris, à l'abbaye de Saint-Germain des Prés dont l'abbé Guillaume Briçonnet, fils de l'archevêque de Reims dont il fut l'archidiacre, n'était d'ailleurs point hostile à leurs tendances. En 1518, ce Guillaume Briçonnet, devenu évêque de Meaux, interdit les chaires de son diocèse aux Cordeliers et autres religieux, et appela pour les remplacer les pieux prédicateurs qu'il avait vu étudier les questions religieuses dans la retraite de Saint-Germain. Ces prédicateurs prêchèrent la Réforme. En même temps, Le Fèvre .d'Etaples commença à répandre dans le pays la traduction en langue vulgaire des diverses parties de la Bible, les Épîtres de Saint Paul, en 1521, les quatre Évangiles en 1523. Bientôt, le diocèse de Meaux fut gagné à des .croyances anticatholiques, sans que l'évêque ni ses prédicateurs eussent la moindre intention de se séparer de Rome. C'est alors que le contrecoup des événements d'Allemagne se fit sentir en France. Les livres de Luther se répandirent aussi rapidement, ainsi que ceux d'Erasme de Rotterdam, et la Réforme germa dans la ville de Paris, en Dauphiné, à Mâcon, à Lyon, à Montbéliard, en Lorraine. La sœur du roi François Ier, Marguerite d'Orléans, duchesse d'Alençon, s'était laissée gagner par Le Fèvre d'Etaples et l'évêque Briçonnet couvrait les réformateurs de sa puissante protection, Mais, en 1525, interprétant la défaite de Pavie, la prise du Roi, les malheurs publics comme une punition du ciel, les évêques, les Parlements, et surtout la Faculté de Théologie de Paris, la Sorbonne, réclamèrent le châtiment de la nouvelle hérésie. La répression devint très violente à partir de 1528 ; mais loin de diminuer le nombre des réformés, ces mesures ne faisaient que l'accroître.

      La ville de Reims, en dépit du grand nombre d'églises, d'abbayes, d'ordres religieux qui s'y trouvaient, fut atteinte, comme Châlons, Troyes, Vitry, Vassy, Langres, Metz, Sedan, etc., par la nouvelle doctrine. En 1525, les réformés « font gras publiquement aux jours défendus ». Ils brisent à coups de pierres la lanterne placée devant l'image de la Vierge au portail de la Cathédrale. Ils renversent les croix sur le Parvis, à l'église de la Madeleine, au cimetière Saint-Jacques. La croix de Fust, entre Saint-Martin et Saint-Timothée, est jetée bas trois ou quatre fois. Aux environs de 1545, les Crayères, derrière Saint-Nicaise, les bois de Muire, les châteaux de Bezannes, d'Ay, de Nanteuil-la-Fosse et de WarmeriviIle étaient les lieux de rendez-vous des prêches secrets.

      Le jeune archevêque, Charles de Lorraine, prenait donc possession de son siège épiscopal, à une époque fort troublée. Il s'occupa tout de suite de combattre l'hérésie. Mais les affaires temporelles, absorbant toute son attention, ne lui permirent pas tout d'abord, d'examiner, comme il l'aurait voulu, les progrès constants de l'hérésie dans son diocèse. La guerre venait de se rallumer entre François Ier et Charles-Quint. Le duc de Guise, gouverneur de Champagne, se jeta dans le Luxembourg, aidé par un secours de 10.000 livres fournies par les Rémois. De plus, ceux-ci durent compléter encore leurs fortifications par des plates-formes construites près du château de l'archevêque, à la Porte Mars et des portes Régnier-Buiron et Saint-Nicaise. Les Impériaux ne purent d'ailleurs envahir le royaume. Décimés par la maladie, ils durent consentir à la paix. Mais le roi François Ier mourut sur ces entrefaites. Son fils, Henri II, avait alors 29 ans. Il fit son entrée à Reims, le 25 juillet 1547, pour recevoir le sacre. La cérémonie fut célébrée le lendemain, 26 juillet, avec une pompe encore plus magnifique que de coutume ; tous les princes du sang, presque tous les pairs, laïques ou ecclésiastiques, y assistaient en personne. Le jeune Charles de Lorraine officiait en qualité d'archevêque, duc de Reims. Cinq jours plus tard, il recevait le chapeau de cardinal ; il n'avait encore que 23 ans. Le roi et l'archevêque, tous deux à peu près du même âge, se prêtèrent, désormais, un appui très sincère. Et alors seulement, Charles de Lorraine put songer à réaliser les grands projets qu'il méditait depuis son élévation au siège de Saint Rémi. Il répétait volontiers que le devoir des évêques n'était pas seulement d'exercer l'autorité, mais aussi de se rendre utiles par des fondations dignes de leurs ouailles. En présence des troubles causés dans l'église catholique par le mouvement de la Réforme, le premier devoir était évidemment de travailler au triomphe de la foi. Mais, et c'est une qualité trop rare et qu'il est bon de souligner, Charles de Lorraine ne pensait pas que la conversion des hérétiques dût s'obtenir par d'autres armes que la parole et le bon exemple. A une époque assoiffée du désir d'apprendre et de connaître, il fallait donc offrir une substantielle nourriture intellectuelle, sauf à faire diriger les études par des maîtres d'une foi à toute épreuve, capables de réfuter victorieusement les adversaires. Et c'est ainsi qu'au moment de partir en Italie, au mois de septembre 1547, pour recevoir le cardinalat des mains du Pape, le jeune archevêque avait déjà discuté, avec le roi Henri II dont il avait l'entière confiance, la fondation d'une véritable Université à Reims.

Université de Reims

      Il avait, d'ailleurs, un amour très désintéressé de la culture littéraire. Condisciple du fameux poète Ronsard, au collège de Navarre, il resta toujours son protecteur. Il comblait de bienfaits le chancelier de l'Hôpital, et Rabelais, lui-même, eut plus d'une fois à se louer de son intervention en sa faveur. C’est le cardinal de Lorraine qui lui fit donner la cure de Meudon, et obtint pour lui l'autorisation de publier et de mettre en vente la « Suite des Faicts et dicts de Pantagruel ». Aussi l'appela-t-on un peu plus tard « le Mécène des savants, des poètes et des artistes ».

      Mais étudions, en détail, la fondation de l'Université de Reims.

      Nous avons déjà parlé du développement des écoles épiscopales de la, ville jusqu'au XIIIe siècle. On sait qu'après avoir été très florissantes sous des maîtres tels que Rémi d'Auxerre et Hucbald de Saint-Amand, puis Gerbert et saint Bruno, elles avaient fini par subir une sorte d'éclipse devant le succès de la grande Université de Paris. En 1244, l'archevêque Juhel leur avait assuré une assez nombreuse clientèle, en réorganisant le collège des Bons-Enfants auquel s'ajoutaient les pensionnaires du collège des Écrevées et des écoles abbatiales de Saint-Denis, les enfants de la Maîtrise de Notre-Dame et de la commanderie des Templiers. Mais, malgré ces efforts, alors comme aujourd'hui, au bout d'un certain nombre d'années d'études, les jeunes Rémois devaient plier leur petit bagage et s'en aller vers la capitale pour les compléter auprès des illustrations de l'époque. Au milieu des troubles de la minorité de Charles VI, en pleine guerre de Cent Ans, l'archevêque Guy de Roye s'était vu. dans l'obligation de fonder à Paris, un collège de Reims pour ceux de ses diocésains qui voulaient y poursuivre leurs travaux. Cette création aurait pu avoir, pour conséquence fâcheuse, de supprimer à jamais le désir de donner aux écoles de Reims une importance plus considérable. Fort heureusement, il n'en fut rien. Déjà, à là fin du XVe siècle, en 1496, exactement, l'archevêque Guillaume Briçonnet, qui chérissait les lettres autant que les arts, proposa aux Rémois l'établissement ou d'une Université ou d'une Manufacture. La réponse fut très nette. Les habitants, épuisés par les luttes de la guerre, préférèrent l'indispensable à l'utile, c'est-à-dire qu'ils optèrent pour la manufacture qui fut immédiatement installée vers la rue du Marc, près du Marché aux Draps. Les étudiants se trouvèrent donc toujours dans la nécessité d'aller conquérir leurs grades à Paris. Au milieu du XVe siècle, une telle situation devenait véritablement humiliante pour une ville aussi importante que la cité du sacre. Paris mis à part, Toulouse, Montpellier, Orléans, Cahors, Grenoble, Angers, Orange, Aix, Dôle, Poitiers, Caen, Nantes, Bourges, Bordeaux, possédaient déjà une Université.

      L'idée de Charles de Lorraine, — tandis qu'il s'en allait à Rome, uniquement, en apparence, pour recevoir le chapeau de cardinal, mais en réalité pour négocier une alliance avec la Papauté contre l'Empereur Charles-Quint, — venait donc à. son heure. Avec toute l’autorité de sa situation, de sa famille, assuré surtout de l'appui du pouvoir royal, il n'eut point de peine à obtenir la bulle pontificale de Paul III, datée du 5 janvier 1548, et qui permit la création de l’Université de Reims. Ce document est des plus flatteurs pour les Rémois :

       Considérant de quel profit est pour la foi, l'étude des Lettres, quel accroissement en reçoivent le culte divin, la connaissance de la vérité et la pratique de la justice, Nous Nous montrons attentif à tout ce Qui peut exciter cette étude et aider tous ceux qui s'y appliquent. Cette portion de Notre sollicitude éveille encore davantage Nos soins, et Nous Nous montrons plus disposé à satisfaire les vœux qui Nous sont exprimés quand ceux qui Nous les Présentent sont des Rois catholiques, des Évêques et des princes de la sainte Église, et que, de plus, c'est en faveur de lieux déjà célèbres. Ainsi en est-il, sans le moindre doute, de Nos très chers Fils Henri, le Roi très chrétien de France, et le Cardinal Charles, Archevêque de Reims.

       Pour obtenir l'érection d'une Université à Reims, ils Nous ont représenté le privilège de sacrer les Rois et de toucher les écrouelles ; l'éminence et l'antiquité du Siège métropolitain, la dignité de Duc, de premier Pair de France et de Légat-né du Saint-Siège, dont jouit le titulaire de ce siège, la beauté du site, la salubrité de l'air et du climat, la fertilité de la campagne dans laquelle la cité se trouve assise, la grandeur et la beauté de cette même ville, son nombreux clergé, sa forte population, la magnificence de ses édifices sacrés, la quantité de ses abbayes tant de religieux que de religieuses, l'assortiment de tout ce qui est nécessaire à la vie civile et à la nourriture des hommes, l'existence d'un vaste et célèbre Collège, le bien que procureront à l’Église militante les hommes doués de science qui font discerner le juste de l'injuste, briller la lumière de la vérité, en éclipsant ses ennemis, le but qu'ils se proposent, la gloire de Dieu, l'honneur de la Très Sainte Vierge Marie, et l'utilité des populations tant de la Ville et du Diocèse de Reims, que de toute la France, de la Lorraine, du pays de Trèves et de toutes les provinces voisines...

       Voulant donc condescendre à des vœux si légitimes, Nous concédons... la création d'une Université pour l'enseignement des langues grecque et latine, hébraïque et chaldaïque, de la Philosophie naturelle et morale, de la Théologie, des Droits canonique et civil, de la Médecine, de la Physique et des Arts libéraux, à l'instar de toutes les autres Universités du Royaume...

       Nous accordons aux maîtres, aux étudiants et à tout le personnel, les mêmes privilèges, le droit d'y être pourvus des mêmes grandes de Maîtrise, de Baccalauréat, de Licence et de Doctorat, selon les concordats faits et passés entre François 1er et le Saint-Siège ; de porter les insignes de leurs grades, d'être présentés aux bénéfices selon leurs degrés...

       Le Cardinal Charles et ses successeurs pourront établir et réformer les Statuts de la dite Université selon que le besoin s'en fera sentir. De plus, Nous lui accordons toute puissance civile, criminelle et mixte sur tout le personnel de l'Institut, même sur ceux d'un autre diocèse, sans préjudice des droits de l’Écolâtre ; … Nous lui accordons le droit de choisir le Recteur, les Maîtres, Docteurs, Professeurs et autres Officiers... de conférer tous les degrés... Et enfin, le déclarons, lui et ses successeurs, Conservateurs-nés de toutes ces grâces...

       De plus, pour venir en aide aux étudiants pauvres, Nous concédons le pouvoir d'affecter à leur entretien 13 Prébendes fondées en l’Église de Reims, quelques Patronages qui sont à la collation de l'Archevêque, et au besoin deux autres prébendes.

       Enjoignons aux Abbés de tous les monastères du Diocèse d'envoyer étudier à la dite Université deux, trois ou quatre de leurs religieux, selon que le nombre des membres de la Communauté sera ou de dix, ou de vingt, ou de trente, et de les faire jouir de la pension que ces étudiants possèdent dans leurs monastères.

       Pour l'exécution des présentes, Nous députons l'Abbé de Flavigny du diocèse d'Autun, le Vidame de Reims, et Regnault Pyrot, chanoine de Metz, ou l'un d'eux, lorsqu'ils en seront requis par Sa Majesté et le Cardinal.[1]

      Cette autorisation du Pape ne suffisait pas, cependant, à permettre l’ouverture de ladite Université ; il fallait aussi, pour la forme, celle du Roi. Elle ne se fit pas attendre. Dès le mois de mars 1548, des lettres patentes ratifiaient la fondation, et de plus octroyaient aux maîtres, Docteurs... Écoliers, Étudiants, Scribes les mêmes privilèges, franchises, libertés, immunités et exemptions concédées à l'Université de Paris, c'est-à-dire du guet, des gardes, des impositions et aides. Ensuite, ce fut le tour du Parlement, puis de la Cour des Aides, qui durent enregistrer et entériner l'ensemble des mesures prises (29 janvier 1549 et 7 mars 1550) (2).

      Le cardinal de Lorraine fut obligé de dresser à l'avance le Rôle des officiers, suppôts et autres personnes qui jouiraient des exemptions et privilèges accordés à l'Université. Le voici tel qu'il est reproduit dans l'ouvrage de l'abbé Cauly :

       L'Université consiste en quatre Facultés ; la Faculté des Arts ; la Faculté de Médecine ; la Faculté des Droits canon et civil ; la Faculté de Théologie.

       En la Faculté des Arts, il y a deux Nations : France et Lorraine, avec deux bedeaux pour chaque Nation.

       Les Facultés supérieures ont pareillement deux bedeaux qui sont six en nombre.

Un Procureur fiscal perpétuel de l'Université.

Un Receveur-général perpétuel.

Un Scribe, aussi perpétuel.

Deux Avocats et un Procureur pour le Conseil.

Un vice-gérant, en la conservation des privilèges apostoliques.

Un Scribe ou greffier, en ladite conservation.

Le Lieutenant, à Reims, du bailli de Vermandois, conservateur des Privilèges royaux.

Les Avocat et Procureur du roi, en ladite Conservation.

Six ou huit Notaires, en la même conservation.

Un Promoteur en la conservation apostolique.

Deux Messagers jurés, par arrêt de la Cour.

Trois Papetiers jurés, dont l'un est tenu de construire et entretenir une papeterie au lieu dit la Voye-Fossart, terroir de Verpel, canton de Grand-Pré, au diocèse de Reims.

Quatre Libraires, un grand et trois petits, tous jurés.

Un Enlumineur de livres.

Un Écrivain de livres.

Un Relieur de livres.

Deux Parcheminiers jurés, demeurant à Reims.

Tous lesquels Officiers sont au nombre de quarante-quatre, dont il y a bonne part qui sont personnellement ecclésiastiques.

CARDINAL DE LORRAINE

      Mais l'ensemble de ces lettres et autorisations n'était pas le plus difficile à obtenir dans l'organisation nouvelle. Il fallait faire éclore simultanément une Faculté de Théologie, des Écoles de Médecine et de Droit, et une Faculté des Arts correspondant aux Lettres actuelles.

      C'est cette Faculté des Arts qui fut prête la première. Le Cardinal de Lorraine l'installa dans le collège des Bons-Enfants qui s'était déjà agrandi sur la rue Saint-Antoine, c'est-à-dire sur la rue de l'Université, au commencement du XVe siècle.

      Jusqu'en 1876, les Rémois ont pu connaître les bâtiments du Collège des Bons-Enfants, tels qu'ils furent complétés par le Cardinal de Lorraine. Le charmant portail Renaissance, qui ornait l'entrée principale, seul a été conservé, grâce à l'intervention du maire d'alors, le regretté Victor Diancourt ; il a été réédifié rue Vauthier-le-Noir pour servir, jusqu'à ces dernières années, d'entrée au Petit Lycée. Mais il ne suffisait pas non plus d'avoir un local, il fallait assurer la subsistance du personnel. Le 1er avril 1554, Charles de Lorraine publia une lettre pastorale qui est, à la fois, le Règlement et l'acte de Dotation de l'Université de Reims. Il assignait une rente annuelle de 1.000 livres tourinois en fonds de terre pour les pensions, gages et salaires des Docteurs en Théologie, Principal, Régents ès art et en grammaire, etc.

      Le Principal recevait 300 livres tournois ;

      Le Professeur de Rhétorique 120 ;

      Le Professeur de Seconde 70 ;

      Le Professeur de Troisième 40 ;

      Le Professeur de Quatrième 30 ;

      Les Professeurs de Cinquième et Sixième 20 livres.

      Les professeurs de Dialectique, de Logique et de Physique, chacun 50 livres.

      Outre ce traitement, tous avaient droit au logement, à la nourriture et de plus pouvaient accepter de leurs élèves reconnaissants ce qui leur serait offert.

      Enfin deux Docteurs en Théologie expliquaient, l'un la Scholastique, l'autre l’Écriture Sainte ; ils avaient un revenu de cinquante livres également. Tous ces professeurs avaient pour chef le Grand Maître de l’Université choisi par l'archevêque et chargé de la haute administration de tout le collège.[2]

      Les élèves étaient tous externes, sauf quelques boursiers qui suivaient le régime de l'internat.

      Les autres Facultés furent beaucoup plus lentes à se constituer. Celle de Théologie fut d'abord en germe dans la Faculté des Arts parla présence, au Collège des Bons-Enfants, des deux professeurs de Scholastique et d’Écriture Sainte et de quatre prêtres attachés à la Chapelle et chargés de l'enseignement religieux, Mais elle se constitua bientôt en école isolée.

      L'organisation de la Faculté de droit remonte seulement à l'année 1568. Les cours se faisaient deux fois par jour dans le Cloître du Chapitre [3]. Elle eut comme bienfaiteur un certain Antoine Fournier, ancien élève du collège des Bons-Enfants, primicier de Metz qui contribua aussi à permettre l'organisation de la Faculté de Médecine. Mais celle-ci n'eut un local qu'au commencement du XVIIe siècle et c'est alors seulement que commença l'enseignement véritable de l'art médical à Reims.[4]

L’imprimerie

      Parmi les suppôts de l'Université énumérés dans le Rôle cité ci-dessus, on a, sans doute, remarqué la présence de papetiers, de libraires, relieur, enlumineur, mais aucune mention relative aux imprimeurs. Aussi bien l'heureuse découverte de Gutenberg, vieille d'un siècle déjà, n'était pas encore importée à Reims. Sous ce rapport également, la ville du sacre était très en retard sur ses voisines. La première imprimerie était installée à Troyes dès l'année 1483 et à Châlons-sur-Marne dix ans plus tard en 1493. Il était urgent de combler cette lacune ; aussi, à son retour d'Italie, à la fin de 1548, le cardinal de Lorraine s'était-il arrêté à Lyon pour visiter les ateliers de l'imprimeur Nicolas Bacquenois et discuter, sans doute, avec lui, l'éventualité possible de son installation à Reims.

      Ce Nicolas Bacquenois était, en effet, natif du petit village de Beine, près de Reims [5], et se souvenant de sa qualité de diocésain de Charles de Lorraine, il lui avait dédié le premier ouvrage sorti de ses presses.[6] C'était au reste un excellent imprimeur, attentif, bien outillé, qui avait étudié l'art typographique chez les meilleurs maîtres, en particulier chez le fameux éditeur lyonnais de Tournes. Il ne fut cependant pas le premier à s'établir à Reims.

      En 1551, en effet, ,un certain Claude Chaudière, fils de l'imprimeur parisien Regnauld Chaudière, et de plus, héritier du matériel du célèbre Simon de Colines, ouvrit une imprimerie dans une maison dite le Petit Saint-Martin, rue des Fuseliers, à quelque distance de la Cathédrale et du collège des Bons-Enfants. Les impressions de ce Claude Chaudière sont, d'ailleurs, fort rares, on peut dire presque inconnues. Certains biographes nous ont transmis leur titre, mais on n'en possède pas d'exemplaire. En tout cas, la Bibliothèque Municipale de notre ville ne renferme qu'une page de titre, trouvée par le fameux historien de l'imprimerie française, A. Claudin.[7]

      Un an après Claude Chaudière, un autre imprimeur, Nicolas Trumeau était également installé à Reims. Mais le mot imprimeur n'est sans doute pas exact. Tout porte à croire qu'il n'était à proprement parler, qu'un libraire et qu'il se chargeait de faire typographier par d'autres que lui, les libelles qu'on lui commandait. On connaît de lui une affiche, un placard, concernant le commerce des blés et une édition de l'édit potinant création des divers tribunaux présidiaux en France.

      Malgré l'installation à Reims de Claude Chaudière et de Nicolas Trumeau, le cardinal de Lorraine continuait ses pourparlers avec son protégé Bacquenois. Après avoir publié pendant quatre ans, dans la, ville de Lyon, celui-ci se décida enfin à venir à Reims, vers la fin de l'année 1562 ; il s'établit dans la rue Saint-Étienne, aujourd'hui rue de l'Université, près de l'hôpital Saint-Antoine, en face du collège des Bons-Enfants.[8] Il fut d'ailleurs immédiatement gratifié du titre officiel « d'imprimeur de Mgr le Cardinal de Lorraine » et, de plus, le 11 janvier 1553, le roi lui concéda le monopole des livres liturgiques dans le diocèse. Son avenir semblait donc assuré, et, devant cette concurrence inégale, ses collègues ne tardèrent pas à quitter la place. Cependant les difficultés devaient bientôt l'obliger à céder son commerce. Dans un milieu aussi nouvellement acquis flux études supérieures, le débit des livres était fort aléatoire. Pour ses débuts, Bacquenois publia une édition fort soignée du Coutumier de Reims, datée du 15 juillet 1553 ; mais ses exemplaires se vendirent très mal et lui restèrent pour compte. Il se trouva, dès lors, aux prises avec une situation pécuniaire fort embarrassée. Nous ne pouvons pas le suivre dans le détail de ses travaux ; toujours est-il, qu'en 1561, il s'établit définitivement à Verdun, laissant son atelier de Reims à son gendre Jean de Foigny, qui, lui, fut assez heureux pour s'asseoir solidement à Reims et devint la tige d'une famille d'excellents typographes qui perpétuèrent, à leur berceau, durant près d'un siècle, les traditions du fondateur.

      A vrai dire, si les intentions du Cardinal, en créant l'Université et en introduisant l'imprimerie à Reims, étaient, avant tout, de travailler au triomphe de la foi catholique, elles ne se réalisèrent pas sans difficultés. Parmi les imprimeurs et les maîtres il se trouva, en effet, des réformés convaincus et ardents qui propagèrent hardiment les nouvelles doctrines. Vers 1555, trois personnages étaient les chefs de la secte : un certain M. de Bransecourt, personnage d'âge et de marque, Pierre Craon, régent de l'Université, enfin un prote, Geoffroy, de l'imprimerie Bacquenois. « Le premier, dit un écrit, était le bailleur de fonds, le second répandait ses doctrines dans la jeunesse, le troisième, avec les presses du cardinal, publiait clandestinement les pamphlets les plus violents contre la famille des Guise ». Ce M. de Bransecourt hébergea à plusieurs reprises le fameux prédicateur réformé Théodore de Bèze, venu à Reims, notamment en 1561, pour conférer avec le cardinal de Lorraine.[9] Mais le régent Pierre Craon est certainement le personnage le plus curieux parmi les adeptes des idées nouvelles. On l'avait surnommé « nez d'argent », « d'autant, écrit Jean Pussot dans ses mémoires [10], qu'il avait le nez coupé et en portait un d'argent ». Il était très renommé par ses connaissances diverses et gagna un grand nombre d'étudiants qui suivaient ses leçons. Chassé de Reims, il se réfugia à Paris où on lui fit son procès comme hérétique. Condamné à mort, il fut pendu en décembre 1561.

      On peut citer encore, parmi les propagandistes de la foi protestante, un certain Ouriet qui était ministre à Châlons-sur-Marne, et un ancien élève des Écoles de Reims, Micqueau, qui publia de nombreux pamphlets calvinistes. Il y eut bientôt à Reims de 3 à 400 personnes soupçonnées d'adhérer à l'hérésie : des artisans, des bourgeois, des nobles, deux prêtres, un médecin, un magistrat, etc.

      Leur chef était le jeune Antoine de Croy, dont le château de Montcornet, dernière étape française entre Metz, Sedan et l'Allemagne, fut longtemps le refuge de tous les proscrits et de tous les missionnaires de la religion nouvelle.

      Cependant la contre-réformation rémoise s'organisait parallèlement à Reims. La foule anonyme surtout était hostile aux huguenots. La police urbaine sévit contre tous ceux qui étaient suspects de se rendre aux prêches secrets tenus dans les « Crayères ». On ne peut cependant reprocher à la population rémoise de ces actes de violence comme il s'en produisit trop souvent ailleurs. Ainsi la Saint-Barthélemy ne fit à Reims que deux victimes « Messieurs de Lavannes et Nouvion » et les réformés préférèrent, le plus souvent, quitter Reims et s'en aller dans une région ou dans une cité plus favorable à leurs idées. En somme, la ville du sacre fut peu atteinte par l'hérésie.

      Mais il nous faut revenir au cardinal de Lorraine qui, non content de travailler aux fondations les plus heureuses de sa ville épiscopale, participait dans une très large mesure à toutes les affaires de l’État.

      Son influence devint plus grande que jamais après la mort du roi Henri II, en juillet 1559, et l’avènement du jeune roi François II. En effet, tandis que l'autorité du premier prince du sang, Antoine de Bourbon, roi de Navarre, se trouvait diminuée par son mariage avec la protestante Jeanne d'Albret, la famille des Guise se sentait plus puissante encore, grâce à son étroite parenté avec la jeune reine de France, Marie Stuart. Celle-ci était, en effet, la fille de Marie de Guise, devenue reine d'Écosse et par suite la nièce de l'archevêque de Reims et de l'abbesse de Saint-Pierre-les-Dames. Elle fit même de très fréquents séjours dans notre ville, auprès de sa tante [11] et nous ne pouvons oublier de signaler que la Bibliothèque Municipale possède une précieuse relique de cette malheureuse femme, un livre d'heures, magnifiquement relié, qu'elle avait laissé à sa tante, avant de regagner l’Écosse, et qui fut retrouvé à l'abbaye de Saint-Pierre à l'époque de la Révolution.

Concile de Trente

      La mort de François II et l'avènement de Charles IX enlevèrent momentanément un peu de leur puissance aux Guise. Cependant l'archevêque de Reims eut encore à jouer un rôle des plus brillants. C'est lui, en particulier, qui pendant le fameux colloque de Poissy, de septembre à novembre 1561, reçut la mission de défendre la foi catholique contre les ministres protestants les plus réputés, entre autres Théodore de Bèze. Un an plus tard, de novembre 1562 à février 1563, il prenait encore une part très active aux délibérations du concile tenu dans la ville de Trente.

      Il mourut, quelque temps après le roi Charles IX, à la fin de l'année 1574.[12]

Fameux Cardinal de Lorraine

      Nous arrivons ainsi très rapidement au XVIe siècle et à l'époque des guerres de religion. Bien qu'il y ait eu à Reims, comme dans toutes les villes du royaume, des tentatives de propagande en faveur du protestantisme, l'immense majorité de la population resta fidèle au catholicisme. Le fait n'a rien d'étonnant, étant donné la situation particulière de la ville, centre religieux du royaume, jouissant du privilège du sacre, et couverte d'églises et d'abbayes. Mais si la religion réformée ne réussit pas à gagner, parmi les Rémois, de nombreux adeptes, ce fut surtout grâce à la présence, sur le siège archiépiscopal, d'un prélat de grand talent, très énergique, et pourvu d'une très grande autorité sur son clergé et ses diocésains, du fameux cardinal archevêque Charles de Lorraine, le défenseur de la foi catholique au colloque de Poissy contre le non moins fameux Théodore de Bèze.

      Le père du cardinal archevêque de Reims, Claude de Lorraine, duc de Guise, était gouverneur militaire de la Champagne, une de ses sœurs, abbesse du couvent de Saint-Pierre-les-Dames, qui existait aux abords de la place Godinot actuelle, et l'un des plus célèbres couvents de femmes du royaume. Or, ces diverses fonctions devinrent, pour ainsi dire, héréditaires dans la famille des Guise, les fils aînés se succédant comme gouverneurs de Champagne, les cadets se maintenant d'oncle à neveu sur le siège archiépiscopal de Reims, et les femmes comme abbesses. C'est dire tout le rôle joué par notre ville dans les luttes soutenues par la Sainte-Ligue contre les rois Henri III et Henri IV, accusés d'être trop favorables aux protestants et qui ne tendaient rien moins qu’à placer la couronne de France sur la tête d'un membre de la famille de Lorraine. Depuis 1585, la ville de Reims fut ouvertement la citadelle du gouvernement ligueur ; Henri IV n'osa jamais tenter de s'en emparer par un coup de force, et elle ne se rallia qu'en 1594, alors que la France tout entière acceptait le fait accompli et assistait à la conversion du Béarnais. Néanmoins la réconciliation était, somme toute, si peu certaine qu'Henri IV n'osa pas s’aventurer dans sa bonne ville qu'en 1606, quatre ans avant sa mort, qui fut d'ailleurs très regrettée.[13]


[1] L'original de cette Pièce est aux Archives de Reims, liasse II, n° 1 de l'ancien classement.

[2] Le premier recteur de l'Université fut Jean Blavier docteur en théologie de la Faculté de Paris et chanoine de Reims.

[3] G. Laurent : La Faculté de droit de Reims : Annales Historiques de la Révolution Française 1929, p. 329 et suivantes : note sur sa création, son installation et son organisation par le jurisconsulte Buridan, le patient commentateur de la coutume de Reims, décédé dans notre ville, le 5 avril 1623. — Sur Buridan et l'organisation de la Faculté de droit, voir également le chapitre V du tome II.

[4] H. JADART : L'ancienne École de Médecine de Reims, fascicule in-folio avec 4 pl., extrait des Monuments historiques de la Ville de Reims, par Eugène LEBLAN,1882-1886.

[5] Il serait né vers l'an 1550 (H. JADART : Les débuts de l’imprimerie à Reims, ibid., p. 7).

[6] L’oraison panégyrique d'Isocrates, traduite du grec en français par Pierre Adam de Wassigny, petit in-8°, de 88 pages chiffrées, dédié à « Monseigneur le Révérendissime Cardinal de Guise, archevêque de Reims ». Cet ouvrage a été imprimé et édité à Lyon en 1548.

[7] A. CLAUDIN : Les origines de l’imprimerie à Reims : Les trois premiers imprimeurs : Claude Chaudière, Nicolas Trumeau et Nicolas Bacquenois, Paris. A. Claudin, 1891, in-8° — Bibliothèque de Reims, C. R. t II, n° 799.

   Cet ouvrage reproduit le fac-similé du fragment imprimé dont il est question ci-dessus. La marque de l'Imprimeur n'est autre que l'emblème de Charles de Lorraine : une pyramide surmontée d'un croissant au chiffre royal autour de laquelle s'enroule une plante grimpante, avec la devise : Te Stante virebo. Dans le soubassement le nom et les insignes du cardinal-archevêque.

[8] Son établissement avait comme enseigne : au Lion, portant la même figure que sa marque d'imprimeur. C'était un souvenir de la ville de Lyon, où il avait fait ses premières armes et conquis sa célébrité ; il voulut que sur sa marque parlante, ce noble animal qui personnifie la. vaillance, tint sa patte droite appuyée sur une pyramide, emblème du Cardinal de Lorraine et déroulât de la gauche une banderole avec la devise : sequitur fortuna laborem. On trouve cette image assez finement gravée sur la plupart de ses éditions, d'abord sur le Coutumier de Reims, et le lion se transmet sur ses successeurs jusqu'au milieu du XVIIe siècle. Naturellement les Foigny en usèrent les premiers.

[9] C'est dans son hôtel que se réunissaient les protestants. Il fut rebâti, peu après, sous Henri II par Noël de Muire en 1565. Il existe encore à l’intersection des rues du Marc et Linguet.

   De la Renaissance datent aussi les maisons de Nicolas Le Vergeur, rue du Marc, aujourd'hui reconstituée, l'hôtel de la famille de La Salle, rue de l'Arbalète, 4, et celui de Féret de Montlaurent, rue du Barbâtre, 137, 139 et 141, l'hôtel Levesque de Pouilly au n° 7 de la rue de Vesle, enfin la dernière maison portant tourelle à encorbellement rue des Anglais, démolie vers 1900 et rétablie rue des Tournelles. Toutes ces maisons du XVIe siècle existaient encore avant la guerre ! (1914-1918) elles sont longuement décrites dans l'ouvrage de H. BAZIN : Une vieille cité de France.

[10] Jean Pussot fut le véritable chroniqueur de la Ligue à Reims ; c'était un ardent catholique et un admirateur convaincu des Guise ; il fulmina contre Henri III et contre Henri IV ; mais bientôt son honnêteté et son bon sens de bourgeois reprirent le dessus et il s'efforça de pallier ses appréciations précédentes dans ce qu'elles parurent avoir d'excessif.

[11] Après avoir été reine d’Écosse à 7 ans, depuis la mort de son père Jacques V, Marie Stuart fut reine de France en 1668 à16 ans, par son mariage avec le dauphin qui devint roi l'année suivante, le 10 juillet 1569. A la mort de ce dernier, arrivée deux ans plus tard, le 6 décembre 1650, Marie Stuart se retira dans le monastère de l'abbaye de Saint-Pierre-les-Dames dont sa tante Renée de Lorraine, sœur du duc de Guise et de l'archevêque de Reims, était abbesse. C'est là, dans notre ville, qu'elle passa l'hiver de 1560-1561, ayant reçu en douaire la ville et la seigneurie d'Epernay ; c'est là qu'elle porta les deuils successifs de son mari et de sa mère, la reine d’Écosse, décédée quelques mois auparavant, le 11 juin 1560 et dont les restes venaient d'être apportés d'Edimbourg à Reims ; c'est là que les délégués d’Écosse vinrent, à diverses reprises la tenir au courant des affaires du pays et la sollicitèrent de remonter sur le trône laissé vacant depuis la disparition de la régente, sa mère ; c'est de là qu’elle partit pour s'embarquer à Calais et quitter définitivement la France, le 14 août 1561. — Avant la démolition des bâtiments qui bordaient, en 1919, la rue dont le nom évoque aujourd'hui la fastueuse abbaye, on montrait encore, dans les ruines, la fenêtre de la chambre qu'aurait occupée Marie Stuart pendant son séjour à Reims (G. LAURENT : Dénomination de rues : Rapport du 27 février 1925, p. 32-34).

[12] Georges BOUSSINESQ et Gustave LAURENT : «Histoire de Reims» ; Matot-Braine ; Reims 1933, pages 468 à 490, tome I.

[13] Georges BOUSSINESQ et Gustave LAURENT : «Histoire de Reims» ; Matot-Braine ; Reims 1933, page 10 ; tome II.

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